Le Maroc s'ouvre aux écoles supérieures
29 février 2008, adapted from Les Echos
Le Maroc, comme nombre de pays émergents, est confronté à un problème majeur : le manque de cadres compétents et bien formés, en particulier des ingénieurs. Alors que les besoins des entreprises explosent, notamment pour l'aéronautique, l'automobile ou les activités offshore (informatique, centres d'appels ...). Aussi le pays a-t-il choisi de miser à fond sur la formation. Il a lancé, il y a deux ans, un plan ambitieux, baptisé «Emergence», qui prévoit la formation de 10.000 cadres techniques et ingénieurs par an dès 2010 - contre à peine 4,200 l'an dernier. Une «charte nationale» visant à faire de l'enseignement un acteur clef du développement a été signée. En outre, le monde de l'éducation s'ouvre aux entreprises : accueil de stagiaires, interventions de cadres et de dirigeants dans les cours ... Un Conseil de l'enseignement supérieur a vu le jour. Une instance d'accréditation des universités est également en vue, afin de mieux maîtriser la qualité de l'enseignement dispensé.
Enfin, un important effort est accompli en matière d'orientation des jeunes. «Jusqu'à présent, nous formions en majorité des littéraires et des diplômés de sciences humaines», précise Ali Benboubker, gouverneur de la préfecture de Casablanca. Les passerelles ont donc été multipliées, permettant ainsi à des étudiants en littérature de se tourner vers des disciplines plus en phase avec les besoins de l'économie. Le passage au LMD (licence, master, doctorat), qui facilite lui aussi les passerelles, s'inscrit dans cette logique. «Nous avons été parmi les premiers à adopter le LMD, dès septembre 2003, avant la plupart des universités françaises», observe Mohammed Barkaoui, président de l'université Hassan-II à Casablanca. Bref, une véritable mobilisation générale. «Tout le Maroc est d'accord sur un point : le meilleur investissement pour notre développement, c'est la formation», affirme Ali Benboubker.
De fait, l'Eigsi (Ecole des ingénieurs en génie des systèmes industriels) n'est pas la seule école d'ingénieurs française à prendre pied au Maroc. L'Esiea (2) s'est ainsi installée sur place l'an dernier, à Casablanca elle aussi. L'Epitech (groupe Ionis) a ouvert en septembre son campus, toujours à Casablanca. Et le groupe Supinfo vient de dévoiler un très ambitieux projet marocain, avec pas moins de huit campus ou implantations en cinq ans. Au programme, cycle préparatoire, cycle ingénieur (avec double diplôme), mastères, formation continue, certificats spécialisés ... Problème, toutefois : depuis quelques années, l'enseignement des disciplines scientifiques doit être dispensé en arabe. Résultat, les élèves éprouvent ensuite quelques difficultés à suivre un cursus en français ...
De leur côté, les écoles de gestion ne sont pas en reste, que ce soit ESC Toulouse, Grenoble EM, ESC Lille. Les universités s'y mettent aussi : les IAE de Strasbourg et de Valenciennes, l'université de Nice sont présents au Maroc. Enfin, le CNAM (Conservatoire national des arts et métiers) propose la gamme complète de ses formations à distance, tant en management que dans les disciplines techniques. Reste que les institutions françaises, si elles disposent d'un certain avantage au départ, ne sont pas seules en lice. Plusieurs autres pays ont compris que la formation constituait un bon levier pour conquérir des parts de marché au Maroc. Des universités ou des institutions américaines, mais aussi du Canada, de Grande-Bretagne, d'Italie ou d'Espagne avancent leurs pions. «Par tradition, nous sommes plus proches du système éducatif français, indique Mohammed Barkaoui. Mais nous souhaitons choisir ce qui sera le meilleur pour notre pays.»
(1) HEI à Lille, Esigelec à Rouen et EPF à Sceaux.
(2) Ecole supérieure d'informatique, électronique et automatique.
(3) Ecole supérieure du commerce et des affaires.
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